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carnets de guerre
6 janvier 2009

21 décembre. Verdun

21 Décembre 1915. Verdun.

Il est cinq heures du matin, il fait froid, on entend les obus éclater. Je n'ai dormi que deux heures et je n'arrive pas à retrouver le sommeil. Je pense à ma famille, je me pose beaucoup de questions. Vont-ils bien ? Ne sont-ils pas malades ? blessés ? tués ? Tout à l’heure, un de mes camarades a couru vers moi pour me montrer des centaines de rats qui couraient en direction des cadavres. Ils mangent la chair des cadavres, de nos camarades….C'était horrible. J’ai vu un de mes amis entassé dans un mont de puanteur. Je ne savais même pas qu'il était mort, ça m’a fait une boule au ventre. Je le connaissais depuis mon enfance.

22 Décembre 1915.

Il est sept heures du matin. Il y a de la neige, il fait encore plus froid qu’hier. On se serre pour se réchauffer car nos couvertures sont trempées. Maintenant  ça fait déjà un an et cinq mois que, nous sommes là. Les obus me rendent presque sourd. J’ai même fabriqué des espèces de bouchons avec un bout de tissu de mon pantalon. Cette nuit, le commandant a dit « baïonnette au canon ». Mon cœur palpita si fort que je me suis mis à pleurer en pensant à toi, ma femme, et à notre fils. Et là, le commandant dit « En avant ! ». Ce fut un bain de sang partout. Des hommes se faisaient tuer au bout de quelques mètres. Quand le silence se fit, les brancardiers allèrent chercher les soldats blessés. J’arrête de replonger dans l’horreur de cette nuit… Je suis vivant.

23 Décembre 1915.

Il est onze heures du matin. C'est le jour de laver nos vêtements. J'en pouvais plus de les avoir sur moi, ils sentaient très mauvais. Je n'arrête pas de me gratter à causes des totos. Mais quand je remets mes vêtements ça gratte encore plus, on dirait qu'ils se sont multipliés par centaines. A dix- neuf heures c'est l'heure de se remplir le ventre. Hier soir, c’était du bœuf et du bouillon, on aurait dit de l'eau. Et il n’y en avait pas pour tout le monde.  Nous avons tous un bout de pain c'était la seule chose qui était mangeable. On devait le manger rapidement car les rats se seraient régalés avant nous. La nuit on se fait mordre par ces maudits rats. Ils sont horribles avec leur grande queue. Leur corps est aussi  gros. Ils mangent tout ce qu'ils trouvent nos pains, nous et les cadavres. Un jour, en serons-nous réduits à nous comporter comme des rats ? Je me demande parfois si cette guerre ne nous transforme pas en animal.

24 Décembre 1915.

Il est trois heures du matin. J'ai froid, j'ai faim car j'ai presque rien mangé hier soir, que du pain. Je n'ai pas réussi à fermer l'œil de

la nuit. Encore

une longue nuit. Je pense à toi. Je ne sais même plus pourquoi je suis là à me battre. Si, je sais. Pour ma patrie…mais pourquoi ? Pourquoi ont-ils menti ? Pourquoi nous avoir fait croire que cette guerre ne durerait que deux mois ? Pourquoi ? Je commence à devenir fou. Je me parle à moi même, je ris tout seul …

Il faut que je me réveille. Et, à chaque fois, cette impression de vivre un cauchemar s’efface. C’est la réalité.     

   

 

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Commentaires
V
Merci pour ce témoignage !
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